Allemagne: résultat des élections fédérales
Conformément à la hiérarchie des récents sondages, le parti d’A. Merkel, la CDU-CSU, a remporté les élections fédérales avec 33% des suffrages exprimés devant le parti dirigé par M. Schulz, le SPD, qui obtient 20,5% des voix. Ces deux partis historiques enregistrent des scores particulièrement faibles qui ont largement profité au parti nationaliste AfD (13%) et au parti libéral FDP (10%).
Ces résultats ouvrent la voie à un Parlement allemand, le Bundestag, nettement plus fragmenté qu’auparavant. En effet, six partis politiques y seront désormais représentés. Cela n’est pas sans conséquence dans la période qui va désormais s’ouvrir : celle de la formation d’un gouvernement de coalition puisque la CDU-CSU ne dispose pas d’une majorité absolue. Le processus prendra du temps et le gouvernement pourrait ne voir le jour qu’en toute fin d’année. L’agenda de réformes de la zone euro pourrait être, dans un premier temps, mis entre parenthèse, puis singulièrement bousculé en fonction de la coalition qui arrivera au pouvoir. Ainsi l’optimisme autour d’un axe franco-allemand consensuel sur le contenu des réformes européennes pourrait se tempérer quelque peu.
Coalitions possibles selon la répartition des sièges au Parlement
« Le degré de fragmentation du Parlement allemand n’est pas sans conséquence sur la forme de la future coalition de gouvernement. Le parti social-démocrate (SPD) semble disposé à faire entendre sa voix dans l’opposition »
Le résultat des élections fédérales
Les électeurs allemands se sont déplacés en nombre pour ce scrutin puisque le taux de participation a atteint 76%, en forte progression par rapport à 2013 (71,5%). Si la hiérarchie des votes a été plutôt respectée au regard des sondages publiés au cours des dernières semaines, les deux grands partis traditionnels (CDU/CSU et SPD) ont obtenu des scores historiquement faibles. Le parti CDU-CSU d’Angela Merkel, qui arrive en tête des élections avec 33% des voix, obtient 246 sièges au Parlement. Lors de cette mandature de quatre ans, le Bundestag sera composé de 709 sièges. Par rapport à 2013, la CDU-CSU perd plus de 8 points de pourcentage en termes de suffrages exprimés. De son côté, le Parti Social Démocrate (SPD) connaît un revers électoral de taille malgré sa deuxième place, avec seulement 153 sièges (environ 20% des votes), son score le plus faible depuis 1949. Cet affaiblissement des deux grands partis s’est fait au bénéfice d’un soutien d’ampleur au parti de droite nationaliste AfD (Alternative für Deuschtland), militant pour une sortie de l’Euro et la fin de l’accueil des réfugiés. Ce dernier entre pour la première fois au Bundestag, avec 94 parlementaires et un score national de 12,6% des votes. En ex-RDA, à l’est de l’Allemagne, le parti créé en 2013 s’imposerait comme deuxième force politique du pays avec plus de 20% des suffrages. L’autre parti, qui profite du faible soutien à la CDU-CSU et au SPD, est le parti libéral-démocrate (FDP) qui dépasse les 10% de voix et s’arroge 80 sièges dans l’hémicycle. Ce parti, allié de la CDU-CSU à cinq reprises depuis 1949, revient donc aux affaires après une sévère déroute lors des élections de 2013, où il avait échoué à franchir le seuil nécessaire pour faire son entrée au Parlement (5%). Avec des résultats proches de ceux des dernières élections, le parti de gauche radicale, Die Linke, et le parti écologiste, Die Grünen, obtiennent respectivement 69 et 67 sièges. A l’issue de ce scrutin, le bloc des partis de gauche ressort affaibli. Au final, on observe une fragmentation du Parlement allemand avec la participation de six partis politiques sur le mandat 2017-2021 contre quatre partis lors de la précédente législature. Comme nous le faisions remarquer dans notre précédente publication (« Allemagne : jeu et enjeu des coalitions »), cela n’est pas sans conséquence dans la période qui va désormais s’ouvrir : celle de la formation d’un gouvernement de coalition puisque la CDU-CSU ne dispose pas d’une majorité absolue (355 sièges).
Vers une coalition de gouvernement tripartite
Le résultat d’Angela Merkel, qui sera selon toute vraisemblance reconduite au poste de chancelière pour son quatrième mandat consécutif, reste toutefois un succès en demi-teinte. En effet, s’offre désormais à elle seulement deux alternatives dans l’optique de former une coalition si on exclut, de prime abord, l’hypothèse d’un gouvernement minoritaire. Lors des précédentes élections depuis 1990, il aura fallu une période comprise entre 35 et 86 jours afin de négocier un accord de gouvernement, ce qui nous amène au mois de novembre ou décembre pour que ce dernier puisse voir le jour.
Une première option, pour A. Merkel, serait la formation d’une grande coalition sur le modèle de la précédente législature depuis 2013. Cette grande coalition avec le Parti Social Démocrate (SPD) réunirait suffisamment de sièges, 399 sur les 709 que composent le Bundestag. La proximité des deux programmes électoraux sur bon nombre de thématiques domestiques (fiscalité, politique d’investissement, soutien à la R&D, etc.) pouvait laisser présager d’un rapprochement sans trop de difficultés. Mais, à l’annonce des résultats, la direction du SPD a laissé entendre qu’une telle coalition serait hautement improbable. Comme l’a indiqué, dès dimanche soir, M. Schulz, candidat du SPD, le parti aurait plutôt décidé de se mouvoir dans l’opposition afin de reconstruire une base électorale et préparer l’alternance à la fin de ce mandat. En effet, la conduite d’une politique commune au sein d’une coalition pendant quatre ans a, semble-t-il, rendu inaudible les divergences entre les positions du SPD et celles de la chancelière, et ce d’autant plus lorsque les succès politiques ou économiques ont souvent été mis au crédit de cette dernière. Lors de sa conférence de presse, ce lundi, A. Merkel s’est dite ouverte à une négociation avec le SPD afin d’assurer la stabilité politique du pays.
La deuxième option, qui paraît la plus crédible à ce jour, serait la constitution d’un gouvernement composé de trois forces politiques : la CDU-CSU, le parti libéral-démocrate (FDP) et le parti écologiste (Die Grünen). Sur le papier, l’alliance de ces trois partis représente environ 55% des sièges au Parlement. Cette forme de coalition serait inédite au niveau national en Allemagne. En effet, l’alliance de ces trois partis n’a vu le jour qu’à deux reprises (2009 et 2017) à l’échelon régional (Länder). Les obstacles à la réussite de cette entreprise sont multiples tant le FDP et le parti écologiste semblent avoir des divergences de fond sur les thématiques centrales (fiscalité, réglementation du marché du travail, modèle social et environnemental, etc.).
L’orientation de la politique allemande sur la question européenne devrait aussi être un marqueur important des négociations autour de la formation d’une coalition au vu des positions, parfois aux antipodes, exprimées par les trois partis évoqués précédemment lors de la campagne électorale. La période de négociations qui s’ouvre en interne devrait, dans un premier temps, mettre entre parenthèse l’agenda des réformes sur l’intégration européenne.
La désignation du ministre des finances allemand sera un autre élément à suivre avec attention tant la vision de Wolfgang Schäuble, actuellement à ce poste depuis 2009, a été fondatrice dans la construction européenne sous sa forme actuelle. En amont du scrutin, le parti libéral FDP n’avait pas caché son ambition de récupérer ce poste clé et affiche une position critique vis-à-vis des institutions européennes. Le parti envisage également un renforcement des sanctions envers les Etats membres ne respectant pas leurs engagements du pacte de stabilité et de croissance. Par ailleurs, certaines prises de position de W. Schäuble, comme l’idée, évoquée en mars dernier, de transférer les compétences de surveillance des politiques économiques de la Commission européenne à une instance indépendante, semblent en contradiction profonde avec les propositions de réformes proposées par Emmanuel Macron à la suite de son élection (création d’un Parlement et d’un poste de ministre des finances de la zone euro). A la veille d’un discours dans lequel le président français devrait détailler ses propositions de réformes européennes, l’optimisme autour d’un axe franco-allemand consensuel sur le sujet pourrait se tempérer quelque peu.
Télécharger - Allemagne: résultat des élections fédérales (pdf - 476.24 Ko)Rédigé par
Thomas Foicik
Ce document est établi par Covéa Finance, société de gestion de portefeuille agréée par l’Autorité des Marchés Financiers sous le numéro 97-007, constituée sous forme de société par actions simplifiée au capital de 7 114 644 euros, immatriculée au RCS Paris sous le numéro B 407 625 607, ayant son siège social au 8-12 rue Boissy d’Anglas 75008 Paris. Ce document est produit à titre indicatif et ne peut être considéré comme une offre de vente ou un conseil en investissement. Il ne constitue pas la base d’un engagement de quelque nature que ce soit, ni une évaluation de stratégie ni aucune recommandation d’investissement dans des instruments financiers. Il contient des opinions et analyses générales et non personnalisées conçues par Covéa Finance à partir de données chiffrées qu’elle considère comme fiables au jour de leur établissement en fonction du contexte économique, mais dont l’exactitude et la validité ne sont toutefois pas garanties. Les opinions exprimées dans le document peuvent faire l’objet de modifications sans notification. Covéa Finance ne saurait être tenue responsable de toute décision prise sur la base d’une information contenue dans ce document. Ce document est la propriété intellectuelle de Covéa Finance. Toute Utilisation (définie ci-après), reproduction ou diffusion de tout ou partie du présent document devra faire l’objet d’une autorisation préalable de Covéa Finance. Le destinataire du présent document a connaissance et accepte que les données chiffrées, permettant d’établir les opinions et analyses générales et non personnalisées, peuvent être soumises à l’acquisition de droits vis-à-vis de tiers. Par conséquent, les données chiffrées ne peuvent en aucun cas faire l’objet d’une quelconque Utilisation par le destinataire du document sans l’acquisition préalable des droits nécessaires directement auprès des tiers détenteurs de ces droits. Par ailleurs, le destinataire du présent document a connaissance et accepte que Covéa Finance ne sera en rien responsable de toute utilisation faite desdites données chiffrées et assumera seul toutes les conséquences vis-à-vis des tiers détenteurs des droits associés à ces données. L’ « Utilisation » s’entend comme, et de manière non limitative, la manipulation de la donnée chiffrée, la distribution, la redistribution, l’intégration dans un système d’information ou dans des documents de tous types.