Canada : L’embellie conjoncturelle se confirme

Réaction économique
Amérique du nord

EN BREF

  • Le Canada connait une amélioration notable de sa situation économique sur le premier semestre 2017, après 2 années marquées par les effets de la baisse du prix du pétrole. La dynamique actuelle, portée dans un premier temps par la consommation des ménages, semble se diffuser au commerce extérieur et à l’investissement des entreprises. 
  • La Banque centrale canadienne a pris acte du redressement de l’activité économique en  relevant le 12 juillet son taux directeur de 0,25%. Cette hausse qui porte le taux à 0,75% est le premier mouvement de resserrement monétaire depuis 2010. 
  • Le secteur immobilier reste un point d’inquiétude pour la stabilité du pays. Les régions de Vancouver et Toronto connaissent des croissances des prix immobiliers très rapides, alimentant la forte progression de l’endettement des ménages. Le choix de la banque centrale d’initier un cycle de resserrement monétaire en dépit de la faiblesse actuelle de l’inflation est aussi le reflet de la volonté de limiter les déséquilibres. 

Une hausse de taux justifiée par la vigueur de l’activité

Après deux ans de statu quo, la Banque centrale canadienne a décidé de relever son taux directeur de 0,25% lors de sa réunion de politique monétaire de juillet. Le comité juge que la croissance de l’économie canadienne devrait rester durablement supérieure à la production potentielle du pays et que la résorption des capacités excédentaires se fera d’ici la fin d’année 2017, soit plus rapidement que ce qu’elle avait anticipé lors de la réunion de politique monétaire d’avril. La Banque du Canada a ainsi révisé en hausse ses prévisions de croissance du Produit Intérieur Brut pour  2017 et 2018 qui passent respectivement de 2,6% à 2,8% et de 1,9% à 2%. Avec une estimation de la croissance potentielle du pays à 1,4% selon l’institution monétaire, ces prévisions de croissance supérieure au potentiel pour une période prolongée laissent entrevoir des hausses de taux supplémentaires.

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Le dynamisme de l’activité a été soutenu par des dépenses des ménages robustes depuis plusieurs trimestres. La consommation affiche au premier trimestre 2017 un rythme de croissance annuelle de 3% et les ventes au détail en volume s’inscrivent en hausse de 5% en rythme annuel en avril. Cette bonne tenue de la consommation est à mettre en relation avec les progrès observés sur le marché du travail. Les créations de postes ont atteint 45 000 emplois en juin et le taux de chômage s’établit à 6,5% de la population active, contre 7% il y a encore un an. 

Par ailleurs, l’économie semble s’être dorénavant ajustée à la forte chute des prix du pétrole de 2014 et 2015 (-61% pour la référence américaine WTI) qui avait fortement pénalisé l’activité. Le secteur minier, extraction de pétrole et gaz représente plus de 8% du PIB canadien et avait connu à partir de mi-2014 un ralentissement significatif de l’activité. A l’image de la situation du voisin américain, ce fléchissement s’était diffusé à l’ensemble de la sphère industrielle. Avec la stabilisation des prix du pétrole autour de 50$ le baril, l’activité s’est progressivement redressée et les investissements des entreprises en machines et équipements ont enregistré un rebond de près de 6% en  glissement trimestriel au premier trimestre. Les intentions d’investissements des entreprises relevées dans les indicateurs d’enquête sont restées favorables au cours du deuxième trimestre. Cette dynamique doit toutefois être nuancée car elle est bien sûr tributaire de l’orientation future des prix de l’énergie.

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Enfin, l’embellie conjoncturelle touche également le commerce extérieur. Les exportations canadiennes en volume ont atteint en mai un nouveau record et affichent un rythme de croissance annuelle de plus de 8%. Les importations enregistrent une croissance plus modérée de l’ordre de 4%. Si les excédents très importants dégagés par le pays dans les années 2000 semblent encore lointains, la balance des biens canadienne présente un profil en nette amélioration, avec l’apparition d’excédents. 

L’inflation est encore en retrait

En dépit des progrès de l’activité et de la réduction des capacités excédentaires de l’économie, la croissance des prix à la consommation a ralenti depuis le début d’année. Avec une progression de 1,3% en rythme annuel en mai, l’inflation canadienne reste en-deçà de l’objectif de la Banque Centrale fixé à 2%. Le Comité de politique monétaire se montre pour autant confiant dans la trajectoire des prix et estime que le retour à la cible devrait intervenir à l’horizon fin 2018, à la faveur de la dissipation de facteurs transitoires influant à la baisse les prix à la consommation. 

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Dans son rapport sur la politique monétaire, le comité cite trois éléments principaux. Le premier, qui est commun à l’ensemble des pays avancés, tient à des effets de base moins favorables sur les prix du pétrole. Suite à la hausse de 45% enregistrée en 2016, le prix du baril s’est modéré depuis le début d’année 2017 et ne contribue plus à la progression de l’inflation en termes annuels. Le deuxième facteur cité est spécifique au Canada et tient aux mesures prises depuis le début d’année par le gouvernement de l’Ontario pour réduire le coût de l’électricité pour les ménages. Ainsi la composante électricité de l’indice des prix national s’inscrit en mai en contraction de 5,5% en rythme annuel. Au total, les prix de l’énergie expliquent une baisse de 0,5% de l’inflation entre le premier et le deuxième trimestre.  Enfin, le troisième facteur de ralentissement de l’inflation concerne les prix des automobiles. Ceux-ci avaient connu en 2015-2016 une forte accélération, liée à une demande robuste et à la dépréciation du dollar canadien (-19% face au Dollar US en 2015). La normalisation récente des prix automobiles a ainsi entrainé, entre le premier et le deuxième trimestre, un fléchissement d’environ 0,2 % de la croissance des prix à la consommation.

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La confiance de la Banque du Canada  quant à un retour de l’inflation vers 2% se base aussi sur l’observation des prix des services. Dans ce secteur, l’inflation affiche en effet une tendance haussière avec des rythmes compris entre 2,3% et 2,5% depuis le début d’année.

Les risques liés à la hausse des prix immobiliers et à l’endettement des ménages demeurent. 

Au-delà de l’amélioration conjoncturelle, l’économie canadienne affiche des vulnérabilités liées au secteur immobilier. Depuis 2016, certaines régions doivent faire face à des hausses des prix résidentiels sans précédent. La ville de Vancouver (Colombie Britannique) a ainsi vu le prix moyen des logements progresser de plus de 28% en rythme annuel durant l’été dernier, et Toronto (Ontario) affiche en juin 2017 une croissance annuelle des prix de plus de 26%. Cette poussée a été favorisée à la fois par une faible offre de logements, une demande d’acheteurs étrangers en progression et par des conditions de financement accommodantes.

Dans sa revue de stabilité financière publiée en juin, la Banque du Canada estime que les prix immobiliers dans ces deux régions ont augmenté avec une rapidité que les fondamentaux économiques ne peuvent directement justifier, ce qui fait peser le risque d’une correction. Les gouvernements de Colombie Britannique et de l’Ontario ont adopté des mesures respectivement en août 2016 et en avril 2017 pour freiner la hausse des prix. Les dispositions comprennent notamment une taxe de 15% sur les achats de biens par les étrangers et les résidents non permanents au Canada. A ce stade, on peut relever que des premiers signes de ralentissement de la croissance des prix émergent pour la région de Vancouver, où les mesures macro-prudentielles s’appliquent depuis août dernier.

La dynamique haussière des prix immobiliers a été alimentée par une accélération des crédits hypothécaires, dans un contexte de taux exceptionnellement bas. L’endettement des ménages canadiens s’est ainsi nettement creusé sur la période récente : en pourcentage du PIB, la dette des ménages est passée de 93% en 2014 à 101% en 2016 selon les données de la Banque des Réglementations Internationaux, ce qui place les ménages canadiens parmi les plus endettés des pays avancés. 

La politique monétaire ultra-accommodante pratiquée depuis le premier semestre 2015 par la Banque du Canada a pu favoriser un recours excessif à l’endettement. La décision d’initier un mouvement de resserrement monétaire a également comme objectif de freiner cette dynamique qui peut, en cas de retournement marqué des prix immobiliers, être source de déséquilibre pour l’économie canadienne. 

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Rédigé par

Sébastien Berthelot le 21 Juillet 2017

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