Suivi des Perspectives Économiques et Financières
Retrouvez notre analyse des marchés de la semaine du 23 décembre 2019
Vers la fin d’une certaine forme de Multilatéralisme?
Le 11 décembre dernier, le nouveau veto des Etats-Unis à la nomination de membres pour le remplacement des juges américain et indien de l’Organe d’Appel (OA) de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) semble sonner le glas d’une certaine forme de Multilatéralisme, thématique que nous suivons attentivement depuis 2017. En bloquant désormais le fonctionnement opérationnel de l’OA, en l’absence d’un nombre de juges suffisant pour traiter les appels dans la procédure de règlement des différends commerciaux (un seul juge reste en fonction sur 7, 3 étant nécessaires pour un fonctionnement à minima), les Etats-Unis vident implicitement l’OMC d’une partie de sa substance, à savoir son rôle d’arbitre supranational. Les griefs des Etats-Unis envers le fonctionnement de l’OA sont anciens (depuis 2005) et ne traduisent pas ici uniquement la nouvelle posture américaine défendue par le président Trump. Au-delà des problématiques de gestion opérationnelle, cette position illustre une approche critique des Etats-Unis au regard des décisions rendues par l’OA qui, en faisant jurisprudence, empêcheraient les Etats d’utiliser certains instruments de défense commerciale pourtant prévus dans les accords de l’OMC.
Le dysfonctionnement de l’OA ramène désormais l’OMC à un rôle seulement consultatif. L’horizon apparaît ainsi plus dégagé pour les Etats souhaitant appliquer de façon unilatérale des mesures restrictives sur les flux commerciaux, et de fait réinstaure un rapport de force défavorable aux petits pays exportateurs face aux géants américain, chinois, mais aussi européens. Dans le contexte actuel, sortir de l’impasse paraît extrêmement compliqué, toute réforme de l’OMC nécessitant un dialogue constructif entre ces 3 géants. Cet épisode ne sera probablement pas le dernier à illustrer la transformation des relations internationales que nous vivons actuellement. A ce titre, le rapport sur le commerce mondial 2019 publié le lendemain de cette annonce est édifiant. Sur les deux dernières périodes annuelles considérées, les montants d’importations impactés par des mesures restrictives mises en place ont connu, selon l’OMC, une accélération spectaculaire pour atteindre un niveau historiquement élevé (747 Mds$ entre oct.18 et oct.19, soit une hausse annuelle de 27%). Alors qu’en 2009, seules 0,6% des importations mondiales étaient sujettes à des mesures restrictives, 7,5% de ces flux étaient en 2018 concernés. Une nouvelle preuve si besoin en est que le monde économique a bel et bien changé.
« Alors qu’en 2009, seules 0,6% des importations mondiales étaient sujettes à des mesures restrictives, 7,5% de ces flux étaient en 2018 concernés »
Les flux commerciaux de plus en plus pénalisés par des mesures restrictives
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