Environnement économique - Juin 2021
Retrouvez notre rétrospective de l'environnement économique du mois de juin 2021 des zones Amérique, Europe et Asie-Océanie
Nos perspectives économiques et financières
Notre hypothèse d’une possible, probable dépression de mi-2020 fondée sur l’effondrement de l’économie, consécutive à la mise à l’arrêt de l’activité déjà particulièrement fragile, est remise en question par la vigueur des anticipations de rebonds économiques. Ces anticipations sont alimentées par des politiques monétaires encore plus agressives et surtout des politiques de soutien budgétaire d’ampleur inégalées. Pourtant, la pertinence de ce sentiment devra être confirmée par une analyse fine de ces mesures, afin d’éloigner durablement des risques de poches de dépression, en particulier à la levée de ces différents soutiens extraordinaires. Dans le cadre de nos perspectives de juin, nous nous sommes attachés à analyser les plans des trois grandes zones économiques et à comprendre quelle part la politique énergétique y prend, un secteur déterminant pour la souveraineté des Etats et aux effets multiplicateurs importants sur les tissus industriels, avec parmi, le secteur automobile
La reprise de l’activité reste marquée par les tensions entre l’offre et la demande
Au mois de juin, les données publiées illustrent la reprise de l’économie mondiale et laissent espérer une normalisation progressive de l’activité. La multiplication des variants du virus de la Covid19, qui a entrainé un report de la dernière phase de déconfinement au Royaume-Uni, rappelle toutefois que les développements économiques restent tributaires des évolutions de la pandémie. Les frictions entre l’offre et la demande s’intensifient, notamment au sein de l’industrie où la production peine à faire face à l’augmentation des commandes sur fond de perturbations des chaînes de valeur. Dans ce contexte, les tensions inflationnistes s’accroissent. Bien que les embauches accélèrent, l’état de santé du marché du travail demeure préoccupant, aussi bien aux Etats-Unis, où près de 7,6 millions de postes ont été détruits depuis la crise, qu’en Zone euro, où les dispositifs de soutien gouvernementaux biaisent l’appréciation. Sur le marché des changes, l’Euro s’est déprécié de 2,6% face au dollar à 1,1884 dollar pour un euro. Le prix du pétrole Brent enregistre une hausse de 8,4% et s’établit à 75,13 dollars le baril.
Aux Etats-Unis, la reprise de l’activité se poursuit sur fond d’accélération des tensions inflationnistes. Les créations de postes ont atteint 559 000 emplois en mai, un rythme rassurant après la relative faiblesse enregistrée en avril. Le marché du travail montre des signes de tensions. Le nombre d’emplois non pourvus a atteint un nouveau point haut, signe d’une friction importante entre offre et demande de travail. Néanmoins, si les embauches ont accéléré depuis le début d’année, l’emploi reste en déficit de 7,6 millions de postes par rapport à la situation pré-crise. La dynamique de l’industrie américaine demeure solide et la production est désormais revenue très proche des niveaux d’avant crise. Du côté des consommateurs, l’indice de confiance du Conférence Board enregistre une nouvelle progression en juin, porté notamment par une meilleure appréciation des perspectives d’emploi. Les revenus des ménages et les ventes au détail reculent au mois de mai mais illustrent avant tout le contrecoup des chèques versés aux ménages en mars et avril par le gouvernement fédéral. Du côté des prix, l’inflation a enregistré une nouvelle progression significative en mai et atteint 5,0% en rythme annuel. L’inflation sous-jacente s’inscrit également en hausse et atteint 3,8%. Cette accélération du rythme annuel était anticipée et repose, outre les effets de base, sur l’accélération de quelques composantes particulièrement affectées par le confinement. La Réserve Fédérale a pris acte de cette hausse et a relevé ses projections d’inflation et de croissance, continuant toutefois de considérer cette hausse comme essentiellement transitoire. Lors de sa dernière réunion, la Fed n’a pas apporté de modification majeure à sa politique monétaire et sa communication suggère un degré de confiance plus affirmé dans la reprise. Une majorité de membres du comité envisage désormais 2 hausses de taux en 2023. Enfin, sur le plan budgétaire, le Président Joe Biden et un groupe bipartisan de Sénateurs ont conclu un accord en faveur d’un programme de dépenses d’infrastructures. Le plan prévoirait 1200 Mds$ de dépenses sur 8 ans (contre 2 250 Mds$ dans le projet d’infrastructure initial du Président).
Au Royaume-Uni, le premier ministre Boris Johnson a annoncé, face à l’augmentation des cas du variant « delta », le report de la dernière phase de déconfinement du pays du 21 juin au 19 juillet. Les indicateurs de climat des affaires publiés sur le mois continuent toutefois de décrire une reprise de l’activité. La Banque d’Angleterre (BoE) a maintenu inchangé son taux directeur (à 0,1%) et son programme d’achats d’actifs dont l’objectif, en terme de stock détenu, est de 895 Mds£ (875 Mds£ d’obligations souveraines et 20 Mds£ d’obligations privées). Le comité de politique monétaire a noté des surprises économiques positives dans les données d’activité et d’inflation. Le comité estime ainsi que l’inflation pourrait accélérer plus fortement que prévu et dépasser, temporairement, les 3% (bien au-dessus de l’objectif de 2% de la BoE).
En Zone euro, les indicateurs de climat des affaires de juin décrivent une accélération de l’activité alors que les économies se déconfinent progressivement. La réouverture de l’économie profite ainsi aux secteurs des services et de la distribution tandis que l’activité demeure tendue dans le secteur manufacturier, où une demande dynamique, couplée à des difficultés d’approvisionnement, provoque des tensions inflationnistes. En avril, les données d’activité restent très volatiles et hétérogènes au niveau géographique, en lien avec le calendrier des mesures sanitaires. Dans un contexte de réouverture et sous le coup d’importants effets de base, l’inflation en Zone euro reste élevée, à 1,9% en juin. Les prix devraient poursuivre leur augmentation dans les mois à venir, notamment via une importante accélération de l’inflation allemande, contrecoup de la réduction temporaire de la TVA au deuxième semestre 2020. Du côté de la politique monétaire, la Banque Centrale Européenne a maintenu inchangé son rythme d’achats d’actifs pour le troisième trimestre 2021. Bien que les projections de croissance et d’inflation de la BCE aient été revues légèrement en hausse, le conseil des gouverneurs considère qu’une politique monétaire expansionniste est encore nécessaire pour préserver les conditions de financement et les perspectives d’inflation. Sur le plan budgétaire, la Commission Européenne a évalué positivement les plans de relance de l’Allemagne, de l’Espagne, de la France et de l’Italie qui devront encore être votés par le Conseil de l’UE.
En Chine, la normalisation de l’activité se poursuit. La dynamique des ventes au détail, en hausse au mois de mai, suggère un rebond de la consommation encore timide, même si la Golden Week (semaine fériée) a soutenu la consommation privée. La production industrielle et l’investissement en actifs fixes poursuivent leur ralentissement. Face à la forte accélération des prix à la production, le gouvernement chinois a multiplié les efforts pour enrayer la hausse du prix des matières premières et a notamment annoncé la vente d’une partie des réserves stratégiques de métaux du pays. Enfin, la banque centrale chinoise va relever le ratio de réserves obligatoires pour les dépôts en devises étrangères, une décision qui reflète notamment l’inquiétude croissante quant à la forte appréciation du yuan contre le dollar sur la période récente.
Au Japon, l’activité reste déprimée. L’indice PMI Service continue d’indiquer un recul de l’activité par rapport au mois précédent tandis que dans le secteur manufacturier, la dynamique se modère quelque peu sur fond de difficulté d’approvisionnement. Du côté de la politique monétaire, la Banque du Japon (BoJ) a maintenu globalement inchangé le cadre de sa politique monétaire ainsi que ses perspectives économiques. La BOJ a toutefois annoncé l’extension de la durée de sa facilité de crédit pour les entreprises mises en place par la banque centrale suite à la pandémie.
Sources des données: Refinitiv, Bloomberg, US Bureau of Labor Statistics, US Bureau of Economic Analysis, Eurostat, BCE, Markit, Statistics Bureau of Japan, Japan Cabinet Office, National Bureau of Statistics of China.
Rédigé par
Pierre BOSSUET
Analyste économique
Le 5 juillet 2021