Environnement économique Octobre 2020
Retrouvez notre rétrospective de l'environnement économique du mois d'octobre 2020 des zones Amérique, Europe et Asie-Océanie
Nos perspectives économiques et financières
Le choc récessif lié à la crise sanitaire vient s’appliquer sur des fragilités majeures, pré-identifiées dans nos Perspectives Economiques et Financières : dettes des agents publics et privés, structures des revenus et inégalités, remise en cause de la mondialisation fondée sur le multilatéralisme et chocs politiques et géopolitiques. Les circuits classiques de sortie de crise pourraient s’avérer rapidement inopérants car les bases sont déjà malsaines. Dans ce contexte, nous tablons sur une dépression économique sévère qui devrait amplifier les fragilités observées suite à la crise financière de 2008.
Le mois d’octobre a été marqué par une nouvelle dégradation significative des conditions sanitaires. Dans ce contexte, plusieurs pays d’Europe ont annoncé de nouvelles mesures sanitaires drastiques qui devraient fortement augmenter le coût économique et social de la pandémie. Dans un environnement déjà marqué par un endettement excessif et des inégalités importantes, ce nouveau choc vient renforcer les déséquilibres structurels que nous mettons en avant depuis plusieurs années et cela d’autant plus que les effets des mesures sanitaires du début d’année sur l’emploi, les défaillances d’entreprises, les comptes de résultat et les bilans ne se sont pas encore fait sentir pleinement. La perspective d’une reprise de l’économie, pourtant annoncée par le FMI lors de la mise à jour de ses prévisions économiques en octobre, apparaît incertaine et toujours autant conditionnée à l’évolution de la situation sanitaire. Sur le marché des changes, l’Euro s’est légèrement déprécié (-0,1%) face au dollar à 1,17 dollar pour un euro. Le prix du pétrole Brent poursuit son recul, avec une baisse sur le mois de 8,5% qui fait chuter le prix du baril à 37,5 dollar.
Aux Etats-Unis, le mois a été rythmé par une actualité politique riche à l’approche des élections présidentielles du 3 novembre. Le candidat démocrate, Joe Biden, a maintenu son avance dans les sondages. Les Démocrates pourraient par ailleurs être en mesure d’obtenir la majorité des sièges au Sénat. Néanmoins, les sondages ont, comme nous l’ont montré les élections de 2016, une valeur prédictive parfois très limitée. Dans ce contexte, les négociations entre la Maison Blanche et les Démocrates pour tenter de conclure un accord de soutien budgétaire n’ont pas abouti. Quand bien même un accord serait conclu entre les Démocrates et la Maison Blanche, l’opposition reste forte parmi les Républicains vis-à-vis d’un plan d’ampleur, ce qui rend peu probable son adoption par le Sénat. Au niveau économique, l’activité a poursuivi son rattrapage avec une dichotomie assez marquée entre une consommation très vigoureuse et une industrie qui affiche une dynamique nettement moins porteuse. Au troisième trimestre, le Produit Intérieur Brut américain a enregistré un rebond de 7,4% en glissement trimestriel, une hausse qui ne permet pas d’effacer la chute du trimestre précédent. La situation sur le marché du travail reste critique alors que les nouvelles demandes d’allocation chômage, bien qu’ayant refluées, restent sur des niveaux historiquement élevés. Enfin, la situation sanitaire est en nette dégradation. Le nombre de nouveaux cas s’inscrit en hausse constante.
En Zone euro, c’est d’abord l’aggravation significative de la situation sanitaire qui a occupé le devant de la scène et a poussé les pays à mettre en place de nouvelles mesures de restrictions. La France et l’Allemagne ont notamment annoncé de nouvelles mesures de confinement. Ces développements mettent en péril les perspectives de reprise de l’économie et accentuent le risque d’une récession en double creux. Rien n’assure donc que le rebond, en partie mécanique de l’économie au troisième trimestre (croissance du PIB de 12,7% par rapport au trimestre précédent) se poursuive. Cette inquiétude s’est d’ailleurs fait ressentir dans les indicateurs de confiance, en repli en octobre. Sur la période, les gouvernements ont continué de dévoiler leurs plans de relance pour 2021 et ont annoncé de nouvelles mesures de soutien. Le gouvernement espagnol a ainsi dévoilé un plan de relance de 72 Mds€ (environ 5,8% du PIB) sur trois ans. Le gouvernement souhaite financer ce plan à travers le fonds de relance européen (via 60 Mds€ de subventions et 12 Mds€ de prêts sur les 140 Mds€ de prêts et subventions que l’Espagne espère obtenir). Au niveau européen, les négociations sur le plan de relance et du budget ne sont pourtant pas achevées et continuent de bloquer sur (i) la question de la conditionnalité à l’Etat de droit, qui suscite l’opposition de la Hongrie et de la Pologne et (ii) le montant du budget, que le parlement souhaite augmenter. Du côté de la politique monétaire, la Banque Centrale Européenne a maintenu le statu quo mais a laissé entendre qu’elle procéderait à un nouvel assouplissement lors de sa réunion de décembre. Enfin, concernant les négociations du Brexit, aucune avancée n’a été enregistrée lors des négociations et à ce à deux mois de la fin de la période de transition.
En Chine, la situation conjoncturelle et sanitaire apparaît mieux orientée que dans le reste du monde. Selon le FMI, La Chine devrait ainsi être le seul pays enregistrant une croissance positive de son PIB en 2020. La reprise de l’économie chinoise s’est appuyée sur le dynamisme de l’industrie et des exportations. La consommation montre aussi des signes de reprise en septembre. Du côté de la politique monétaire, le mouvement d’appréciation du Yuan a poussé la Banque Centrale à intervenir. Au Japon, la consommation peine à se redresser. Dans un contexte sanitaire toujours difficile et pesant, la confiance des ménages se redresse très timidement et reste en absolu très dégradée. L’industrie paraît également à la peine et demeure largement en dessous des niveaux d’avant-crise.
Sources des données : Refinitiv, Bloomberg, US Bureau of Labor Statistics, US Bureau of Economic Analysis, Eurostat, BCE, Markit, Statistics Bureau of Japon, Japan Cabinet Office, National Bureau of Statistics of China.
Rédigé par
Pierre Bossuet
Analyste économique
Le 3 novembre 2020