Environnement économique Mai 2021
Retrouvez notre rétrospective de l'environnement économique du mois de mai 2021 des zones Amérique, Europe et Asie-Océanie
Nos perspectives économiques et financières
Le choc récessif lié à la crise sanitaire vient s’appliquer sur des fragilités majeures, pré-identifiées dans nos Perspectives Economiques et Financières : dettes des agents publics et privés, structures des revenus et inégalités, remise en cause de la mondialisation fondée sur le multilatéralisme et chocs politiques et géopolitiques. La crise du covid-19 et les réponses politiques apportées ont exacerbé les divergences. Le déplacement du centre de gravité économique mondial vers l’Asie en sort renforcé. Le très haut degré d’incertitude entourant l’évolution de la situation sanitaire ne permet pas d’écarter un scénario de dépression.
Le redressement économique interroge sur les perspectives de normalisation monétaire et budgétaire
Au mois de mai, les données publiées sur la période restent très marquées par d’importants effets de base reflétant le début de la crise pandémique en mars-avril 2020. La situation sanitaire semble enfin s’améliorer en Zone euro, permettant la réouverture progressive des secteurs les plus affectés et donc le rebond tant attendu de l’activité pour le deuxième trimestre. Aux Etats-Unis, où l’économie a connu un redressement plus précoce en lien avec une campagne de vaccination plus efficace, on observe une accélération de l’inflation qui était largement attendue et reste dominée par des effets transitoires (effets de base, prix du pétrole, hausse de la demande à la réouverture de l’économie et problèmes d’approvisionnement limitant l’offre). Ainsi, le redressement économique mondial interroge sur le calendrier des échéances de la normalisation des politiques monétaires et budgétaires dans les pays avancés. Sur le marché des changes, l’Euro s’est apprécié de 0,98% face au dollar à 1,2201 dollar pour un euro. Le prix du pétrole Brent enregistre une hausse de 3,1% et s’établit à 69,3 dollars le baril.
Aux Etats-Unis, les prix accélèrent alors que le marché du travail déçoit. L’inflation a en effet atteint 4,2% en avril, sous l’impact d’importants effets de base. Ce rebond largement anticipé reflète la dynamique des prix de l’énergie, mais également des tensions sur d’autres produits dans un contexte de réouverture de l’économie. Les prix ont notamment progressé dans certains secteurs, tels que l’automobile et l’électronique, dont l’offre, qui reste contenue par des contraintes d’approvisionnement, n’arrive pas à répondre à la forte demande, stimulée par l’expansion budgétaire. La Réserve Fédérale a continué de relativiser ces pressions inflationnistes, qu’elle juge transitoires. Pour autant, face à l’amélioration de la situation économique, les minutes de la dernière réunion de politique monétaire (FOMC), ainsi que plusieurs commentaires de membres du Comité, indiquent de probables discussions dès la réunion des 15 et 16 juin sur les perspectives de réduction de l’assouplissement monétaire dans un contexte de reprise économique solide. Les derniers commentaires dans ce sens ont été émis en dépit d’un rapport sur l’emploi décevant en avril avec seulement 266 000 postes créés (après 770 000 en mars) alors que 8,2 millions de postes restent à créer pour retrouver le niveau d’avant crise – une dynamique favorable ressort néanmoins des données hebdomadaires de mai. Côté ménages, la consommation stagne en avril, après une forte progression mensuelle en mars liée à la distribution de chèques du gouvernement. En outre, la production manufacturière progresse de 0,4% en avril par rapport au mois précédent malgré un fort recul de la production automobile (-4,3%) lié à la pénurie de semi-conducteurs. Enfin, les négociations budgétaires se poursuivent sur le plan d’infrastructures mais les dernières propositions démocrates (1700 Mds$ contre 2250 Mds$ initialement) et républicaines (928 Mds$ contre 568 Mds$ initialement) restent très éloignées.
Au Royaume-Uni, l’activité se redresse après le déclin du premier trimestre 2021. L’activité avait en effet reculé de 1,5% par rapport au quatrième trimestre 2020, surtout en lien avec des restrictions sanitaires sur les services. Les données d’enquêtes indiquent toutefois un net redressement sur le deuxième trimestre grâce à l’efficacité de la campagne vaccinale. Sur le plan monétaire, la Banque d’Angleterre (BoE) a annoncé une réduction du rythme d’achat hebdomadaire d’obligations souveraines afin que l’enveloppe de 150 Mds£ puisse, conformément à l’agenda de la BoE, être utilisée dans sa totalité vers la fin de l’année. Côté politique, l’alliance menée par le parti indépendantiste écossais SNP (Scottish National Party) a remporté la majorité absolue au parlement écossais et a annoncé que la tenue d’un nouveau référendum pour l’indépendance serait demandée au gouvernement britannique.
En Zone euro, la situation économique et sanitaire s’améliore dans le sillage des Etats-Unis. Les indicateurs d’enquête font en effet état d’un fort dynamisme en avril et mai, surtout marqué dans l’industrie mais aussi, de plus en plus, dans les services qui bénéficient de la levée des restrictions sanitaires. L’activité industrielle reste toutefois contenue (stagnation en mars), l’offre ayant encore beaucoup de mal à faire face à une demande dynamique dans un contexte de pénurie, de hausse des prix des matières premières et de difficultés d’approvisionnement. Néanmoins, ces tensions ne se répercutent pas encore sur les prix à la consommation. Si l’inflation accélère à 1,6% en avril (contre 1,3% en mars) cela tient surtout au dynamisme des prix énergétiques alors que l’inflation sous-jacente (hors énergie et alimentation) ralentit à 0,7%. Sur le plan monétaire, plusieurs membres du Conseil des gouverneurs se sont exprimés en faveur du maintien d’un rythme plus élevé d’achats d’actifs au troisième trimestre à l’issue de la réunion du 10 juin prochain. Côté budgétaire, le plan de relance européen a été approuvé par l’ensemble des Etats membres et devrait pouvoir donner lieu à des premiers déboursements dans les prochains mois. Sur le plan international, la Commission européenne a annoncé la suspension de ses efforts pour la ratification de l’accord d’investissement entre l’UE et la Chine considérant que la situation actuelle n’y était pas propice suite à la mise en place de sanctions économiques, de part et d’autre, en lien avec des accusations de l’UE de persécutions de l’ethnie des Ouïghours par la Chine.
En Chine, l’activité se normalise graduellement après le dynamisme des derniers trimestres. En effet, la production industrielle ralentit légèrement (+0,5% en glissement mensuel en avril), notamment en lien avec des contraintes sur l’offre et des efforts de « décarbonation » des autorités, tandis que les ventes au détail peinent à prendre le relais (+0,3%). Les exportations restent extrêmement dynamiques (+32,3% en glissement annuel en avril) notamment concernant les équipements sanitaires et les produits électroniques. Les prix à la production ont progressé de 6,8% en glissement annuel, tirés par les prix des matières premières, alors que les prix à la consommation évoluent plus faiblement (0,9%). Sur le plan diplomatique, la Chine aurait récemment multiplié les efforts pour rejoindre l’accord de libre-échange transpacifique CPTPP. Au Japon, les mesures sanitaires continuent de pénaliser l’activité. Le PIB japonais s’est en effet contracté de 1,3% au premier trimestre 2021 par rapport au trimestre précédent, ramenant l’activité en-dessous-de son niveau d’avant la pandémie. Avec la prolongation de l’Etat d’urgence jusqu’au 20 juin et son extension à d’autres provinces, les données d’enquêtes font état d’un contexte toujours dégradé au deuxième trimestre.
Sources des données: Refinitiv, Bloomberg, US Bureau of Labor Statistics, US Bureau of Economic Analysis, Eurostat, BCE, Markit, Statistics Bureau of Japan, Japan Cabinet Office, National Bureau of Statistics of China.
Rédigé par
Louis Martin
Analyste économique
Le 31 mai 2021