Environnement économique - Août 2025

Environnement économique

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L’administration américaine fait feu de tout bois

Nos Perspectives Économiques et Financières

Aux Etats-Unis, la nouvelle administration s’inscrit dans la continuité des précédentes, avec la volonté de défendre et asseoir les avantages compétitifs du pays et à en réduire les vulnérabilités dans un monde où son leadership est désormais contesté par la Chine. Cette politique américaine privilégie des approches bilatérales confirmant la volonté de réorganiser les échanges mondiaux sur une base plus régionale. Un mode de fonctionnement qui se généralise dans le cadre d’un multi régionalisme plus affirmé. En Europe, l’Allemagne a annoncé des réformes budgétaires historiques et un plan d’investissement important pour répondre aux défis structurels auxquels son économie est confrontée. L’ampleur des effets des plans allemand et européen sur l’activité de l’UE fait face aux défis de leur mise en place et à la compétition d’accès aux financements, enjeu de rivalité majeur à l’intérieur de la zone. Ce contexte alimente les facteurs structurels inflationnistes que nous décrivons. Cependant, nous restons vigilants sur les effets des droits de douane américains sur la dynamique de l’activité mondiale et ses effets sur l’inflation.

Le mois d’août a été marqué par l’interventionnisme de l’administration américaine, tant sur les droits de douane, sur l’indépendance de la réserve fédérale, que sur la publication des statistiques d’emploi. Ce phénomène s’inscrit dans une tendance plus large : l’influence croissante de la sphère politique sur l’environnement économique, que nous décrivons dans nos perspectives économiques et financières. En Europe, le risque politique français est à nouveau sous les feux des projecteurs dans le cadre du processus budgétaire. Un vote de confiance à l’Assemblée, sollicité par le Premier ministre le 8 septembre, pourrait provoquer la chute du gouvernement. Sur le marché des changes, l’euro s’est apprécié de 1,85% sur le mois contre le dollar, à 1,1658. Le prix du baril de Brent a baissé de 6,08% par rapport au mois précédent, à 68,12$.

amérique

Aux Etats-Unis, le Président américain a annoncé démettre de ses fonctions la gouverneure de la Réserve fédérale (Fed) Lisa Cook, une première dans l’histoire de la banque centrale, invoquant des accusations de fraude au prêt hypothécaire. Cette décision, qui a été attaquée en justice par Mme Cook et sera probablement tranchée par la Cour Suprême, constitue un véritable test de l’indépendance de la banque centrale vis-à-vis du pouvoir exécutif. Par ailleurs, à la suite de la publication de chiffres d’emploi mal orientés en juillet, et comportant de fortes révisions baissières, Donald Trump a licencié la directrice du Bureau of Labor Statistics. Concernant la politique monétaire, le Président de la Fed Jerome Powell a ouvert la porte à une baisse de taux directeur dès septembre, dans un contexte de ralentissement du marché du travail et considérant que la hausse des droits de douane pourrait n’avoir qu’un effet passager sur l’inflation. Cette dernière est restée stable à 2,7% en juillet, mais l’inflation sous-jacente progresse (3,1%), avec des tensions persistantes dans les services. Sur le front de la politique commerciale, l’administration américaine a annoncé un nouveau cadre tarifaire, qui entérine les hausses de droits de douane, mais ne lève pas pour autant toutes les incertitudes. 

RU et europe

Au Royaume-Uni, la croissance du PIB a ralenti à 0,3% en glissement trimestriel au T2 après 0,7% au T1, soutenue par les dépenses publiques (+1,2%), alors que la consommation des ménages stagne et que l’investissement recule (-1,1%). L’inflation reste élevée (3,8% en juillet), tirée par l’énergie, l’alimentation et une inflation sous-jacente également dynamique. Dans ce contexte, la Banque d’Angleterre a abaissé son taux directeur de 25 pb à 4%, après un vote très partagé, illustrant la difficulté de concilier ralentissement économique et inflation persistante. Le gouverneur Andrew Bailey a réitéré un message de prudence face au poids des incertitudes. 

En zone euro, l’inflation se maintient à la cible de 2% en juillet (comme en juin) et les premières estimations d’août, publiées par les quatre plus grandes économies, illustrent aussi une certaine stabilité. Les signes de ralentissement du marché du travail se poursuivent, sans détérioration marquée, au deuxième trimestre. Pourtant, l’indice des salaires négociés, publié par la BCE, a accéléré au deuxième trimestre à 4,0% en glissement annuel contre 2,5% au premier trimestre et montre qu’il est nécessaire de maintenir une certaine prudence concernant l'évolution des salaires. L’activité manufacturière européenne reste mal orientée, en baisse de 0,8% en glissement annuel en juin (hors Irlande), principalement pénalisée par la chute de la production manufacturière allemande (-4,7%). Alors que l’incertitude se maintient sur la politique commerciale américaine, le mois a été marqué par le retour du risque politique français. Dans le cadre du processus budgétaire, François Bayrou a déclaré qu’il sollicitera un vote de confiance de l’Assemblée nationale le 8 septembre, ce qui implique un risque de chute du gouvernement plus important que dans le cas d’une motion de censure. Les partis d’opposition ont déjà annoncé qu’ils voteront contre le gouvernement.

asieEn Chine, l’économie se modère. En juillet, la production industrielle, les ventes au détail et, surtout, les investissements ont ralenti alors que la crise du secteur immobilier s’éternise. Le commerce extérieur s’est toutefois repris sur le mois, bien que les exportations vers les Etats-Unis demeurent en nette contraction (-21,6% sur un an), sur fond de guerre commerciale. Néanmoins, les deux puissances se sont entendues pour étendre la période de trêve sur les droits de douane de 90 jours supplémentaires (jusqu’au 10 novembre). Si l’économie chinoise reste affectée par d’importantes pressions baissières sur les prix, des signes de reprise sont visibles dans les enquêtes, peut-être en lien avec les récentes mesures du gouvernement visant à réduire la concurrence excessive entre les entreprises et ses effets déflationnistes.

Au Japon, la croissance du PIB s’est redressée à 0,3% en glissement trimestriel au T2, après 0,1% au T1, principalement soutenue par l’amélioration du solde commercial et la vigueur des investissements. Les données d’activité de juillet étaient, en revanche, mal orientées. Si l’inflation reste dynamique (3,1% en juillet), elle est surtout soutenue dans l’alimentation mais modérée dans les services, interrogeant sur la transmission des hausses de salaires sur les prix et donc sur le caractère durable de l’inflation.

Rédigé par

Louis MARTIN
Analyste Macroéconomique
Le 1er septembre 2025

Sources des données : Datastream, Bloomberg, US Bureau of Labor Statistics, US Bureau of Economic Analysis, Office for National Statistics, Eurostat, BCE, S&P Global, Statistics Bureau of Japan, Japan Cabinet Office, National Bureau of Statistics of China.