Environnement économique - Février 2024
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Retrouvez notre rétrospective de l'environnement économique du mois de février 2024 des zones Amérique, Europe et Asie-Océanie.
Nos perspectives économiques et financières
Après le constat d’un multilatéralisme en panne, le libéralisme est fortement ébranlé. La multiplication des barrières commerciales, les contraintes à la localisation des investissements ou encore l’accès plus difficile aux ressources bouleversent le fonctionnement des entreprises. Ces dernières avaient l’habitude d’un monde ouvert, dans lequel elles avaient une totale latitude quant à leurs lieux de production et l’étendue de leur chaîne d’approvisionnement. Leurs conditions de financement, favorables depuis de nombreuses années, se sont aussi dégradées avec le changement d’orientation des politiques monétaires, obligées de réagir à une inflation structurellement plus élevée. Elles doivent revoir aujourd’hui leurs modèles. Parallèlement, les Etats, qui veulent accompagner la transition énergétique et réaffirmer leur souveraineté industrielle, se heurtent également à des contraintes de financement plus fortes.
Les banques centrales réitèrent leurs appels à la patience
Des deux côtés de l’Atlantique, les banquiers centraux continuent à plaider la patience : les taux directeurs devraient baisser prochainement, mais pas tout de suite. La croissance économique américaine reste soutenue alors que l’activité européenne demeure pénalisée par les difficultés de l’industrie allemande. En Chine, la mauvaise santé persistante du secteur immobilier a amené la banque centrale à assouplir les conditions de crédit au secteur, en attendant des décisions lors de l’Assemblée Nationale Populaire. Les tensions géopolitiques continuent à peser lourdement sur l’environnement international. Sur le marché des changes, l’euro est resté quasiment stable, perdant 0,1% sur le mois contre le dollar à 1,0826. Le prix du baril de Brent a augmenté de 2,3% par rapport au mois précédent, à 83,62$.
Aux Etats-Unis, tout en réaffirmant que le prochain mouvement sera une baisse des taux directeurs, les banquiers centraux ont continué à appeler à la patience. D’ailleurs, les minutes de la réunion de janvier du FOMC ont souligné le risque d’une action trop rapide qui mettrait à mal le retour de l’inflation à 2%. Cette prudence de la Fed se justifie par un ralentissement plus progressif des prix à la consommation (l’inflation sous-jacente s’est même maintenue à 3,9% en janvier), dont la dynamique de court terme reste soutenue, mais aussi par un marché du travail toujours tendu. En revanche, les indicateurs mensuels d’activité montrent une dégradation de la conjoncture début 2024. Sur le plan budgétaire, Démocrates et Républicains ont conclu un accord de principe pour financer l’Etat fédéral au-delà du 1er mars et éviter une fermeture partielle du gouvernement fédéral. Toutefois, la menace n’est repoussée que de quelques jours, avec des nouvelles échéances le 8 mars puis le 22 mars pour éviter une fermeture du gouvernement. Concernant la politique américaine, Donald Trump continue à dominer les primaires du Parti Républicain.
Au Royaume-Uni, la Banque d’Angleterre a maintenu son taux directeur inchangé, le 1er février, tout en adoptant un ton plus accommodant. Son communiqué ne mentionne plus qu’un resserrement supplémentaire pourrait être nécessaire. Pourtant, après avoir légèrement rebondi en décembre, l’inflation est restée stable, à 4,0%, en janvier. L’inflation sous-jacente est également restée inchangée, à 4,9%, alors que la vigueur persistante des salaires continue à entretenir le dynamisme des prix des services. En ce qui concerne l’activité économique, le PIB s’est contracté de 0,3% au quatrième trimestre 2023, après avoir déjà baissé de 0,1% au trimestre précédent. La poursuite du redressement des indicateurs PMI permet d’entrevoir une amélioration de la conjoncture en ce début d’année, mais au prix de tensions inflationnistes plus fortes. La faiblesse du secteur manufacturier semble toutefois entretenue par l’allongement des délais de livraison causé par la crise en Mer rouge.
En zone euro, comme leurs homologues américains, les banquiers centraux européens plaident la patience. S’ils obtiennent des informations confirmant que l’inflation se dirigent solidement et durablement vers l’objectif de 2,0%, ils réduiront les taux directeurs. Mais il est encore trop tôt. En attendant, après son rebond de décembre, l’inflation a, à nouveau, reculé en janvier, mais de manière très modeste. Elle n’a pas retrouvé son niveau de novembre dernier. De plus, l’inflation sous-jacente reste plus élevée et la progression des prix des services (très sensibles à l’évolution des salaires), est restée stable, à 4,0% en janvier. Sur le front économique, le message envoyé par les indicateurs d’enquête reste mitigé : si la dégradation peut sembler enrayée, il est difficile d’y voir des signes de redressement de la croissance. Les difficultés de l’industrie allemande pèsent lourdement sur la conjoncture de l’ensemble de la zone euro.
En Chine, le secteur immobilier continue à peser sur la conjoncture globale. En réaction, et en attendant d’éventuelles annonces de l’Assemblée Nationale Populaire, la banque centrale a baissé de 25 points de base le taux de référence des crédits immobiliers (une ampleur jamais vue). La tendance à la baisse des prix, à la production et à la consommation, s’est amplifiée en janvier, l’indice des prix à la consommation enregistrant sa plus forte baisse sur un an (-0,8%) jamais enregistrée. Au Japon, alors que l’activité économique était restée très dynamique au premier semestre, le PIB s’est contracté aux troisième et quatrième trimestres (-0,1%) 2023. Le discours de la banque centrale sur les perspectives d’évolution de sa politique reste ambigu, dans un contexte où l’inflation se rapproche de son objectif de 2% et où la progression des salaires semble encore trop limitée pour assurer que le ralentissement des prix ne va pas s’amplifier.
Sources des données : Datastream, Bloomberg, US Bureau of Labor Statistics, US Bureau of Economic Analysis, Eurostat, BCE, S&P Global, Statistics Bureau of Japan, Japan Cabinet Office, National Bureau of Statistics of China.
Rédigé par
Jean-Louis MOURIER
Économiste
Le 4 mars 2024